(Tôkyô zankoku keisatsu ) réalisé par Yoshihiro Nishimura avec Heihi Shiina, Keisuke Horibe, Itao Itsuji, Shun Sugata, Jiji Bû. 2008 / Japon / VO / 1h50 / vidéo Les japonais ne sont pas des gens comme nous. En Occident, quand on veut faire un film mais qu'on a pas d'argent, on va sagement filmer en huis-clos les déboires sentimentaux et professionnels d'un couple de trentenaires en crise, ou bien, si on préfère les films de genre, on se lancera dans la énième ressuçée du "Projet Blair Witch", compensant le minimalisme des effets par une mise en scène inventive apte à susciter l'angoisse, le suspens ou la surprise. A condition d'avoir du talent. Hélas, ce genre d'initiatives extrèmement rentable se traduit bien souvent par ce que les exégèses de ce type de production qualifient dans leur jargon de métier de "foutage de gueule". Vous avez vu "Paranormal activities"? Alors vous savez de quoi je parle. A mille lieux de cet esprit mesquin et cynique qui menaçait d'asphixier le cinéma fantastique mondial, surgît en 2008 le nouveau messie. Son nom : "Tokyo Gore Police". Son auteur: Yoshihiro Nishimura. N'ayant jamais mis les pieds dans une école de cinéma, passionné par l'oeuvre de Salvador Dali, la littérature fantastique nippone, les films de Cronenberg, Carpenter et Verhoeven, Nishimura se démène dix ans durant dans la filière des effets spéciaux, participant à nombre de productions impécunieuses comme "Meatball machine", "Suicide club", "Machine Girl", où la qualité de son travail et l'aspect hors-norme de ses idées volent plus d'une fois la vedette au film lui-même. Encouragé par ses succès, une petite boite de prod lui met enfin le pied à l'étrier, aux conditions habituelles: en contrepartie d'une liberté totale quant au contenu, on tourne en vidéo, en deux semaines (!), et avec l'équivalent du budget cantine du dernier Rohmer. Plantons rapidement le décor: Dans un Japon du futur, la police a été privatisée, et lutte contre une insidieuse invasions de mutants qui ont la particularité de pouvoir se greffer des armes à la place des membres. Agent d'élite de l'unité charger de les exterminer, Ruka (la magnifique Heihi Shiina d'"Audition") traque le chef de l'organisation tout en poursuivant un secret projet de vengeance contre l'assassin de son père. Voilà pour l'histoire. Le résultat: exactement l'inverse de ces films petits-bras susmentionnés: 1h50 de délire visuel non-stop, de créatures insensées, de corps fendus au sabre dans un geyser de sang, de mutilations multiples et variées, de couleurs pétantes, de fausses-pubs pro et anti-suicides (!!!)... Hermétique à toutes notions de limites, de bon goût, de ridicule, le film enchaine dans la bonne humeur les scènes d'actions toutes plus barrées les une que les autres ( un combat à la tronçonneuse attaché au bout d'une chaîne, la lutte à mort dans un bordel entre une femme crocodile et un mac véreux, une fille-chien dont les bras et les jambes ont été remplacés par des...sabres!). Ca parait fou? Croyez-moi, ça n'est rien par rapport à ce que je ne vous dis pas! Généreux en diable, débordant autant d'énergie que d'humour noir,monument érigé à la gloire du système D, "Tokyo Gore Police" est le manifeste cyber-punk d'une nouvelle génération de cinéastes à qui rien ne fait plus peur, ni le sexe, ni le sang, ni la mort, ni surtout la faculté d'en rire. A tous les apprentis réalisateurs qui bidouillez des films avec trois potes et un spot dans un coin du jardin, je dis: allez voir les films de Nishimura, répandez la bonne parole; faire un film d'horreur avec mille hectolitres d'hémoglobines, une demi douzaine de prothèses en latex, un parking en guise de commissariat et le salon de mes parents en guise de bar, c'est possible, je l'ai vu!
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(Crash'n burn) Ecrit et réalisé par Chris Stapp & Matt Heath Nouvelle-Zélande 2007 1h17 HD avec Chris Stapp, Matt Heath, Bonnie Soper, Andrew Beattie, Phil Brough Vous connaissez ce sketch du Monty Python's flying circus dans lequel un allumé se met en tête de briser les records les plus stupides, comme de manger la cathédrale de Chichester, de fendre un train en marche avec le nez, ou de sauter par dessus la Manche en un seul bond? Et bien c'est exactement le profil psychologique de Randy "the Kid" Cambell, le cascadeur le plus "bad ass" de Nouvelle-Zélande, qui ouvre le film à sa gloire sur sa tentative à treize ans et des brouettes de sauter le détroit de Cook séparant les deux îles de l'archipel en vélo!. Descendant direct d'une fière lignée de daredevils (comprenez cascadeurs) kiwis, le jeune Randy vit dans l'ombre de son défunt père, le flambloyant quoique malchanceux "Flaming" Reg Cambell. Son rève? Devenir le plus grand cascadeur de Nouvelle-Zélande en franchissant ce fameux détroit et s'échapper enfin de l'île du sud, de la ferme de son oncle et d'une vie insipide indigne d'une tête brûlée. C'est lors d'une exhibition des calamiteux "Timaru Hellriders", une troupe de cascadeurs cornaquée par l'idôle locale, le bète et méchant Dick Johansonson, que Randy embrassera son destin et la future femme de sa vie, Tracy "Tragedy" Jones. Devenu l'homme à tout faire et le souffre-douleur de l'ignoble Dick, Randy va patiemment endurer toutes les avanies, alors que les morts violentes s'amoncèlent autour de lui, jusqu'au terminus de ses rèves: Auckland, la capitale du show business... Raconté comme ça on pourrait s'attendre à un biopic classique, celui du p'tit gars parti de rien mais qui franchit tous les obstacles pour atteindre les sommets par la seule force de sa volonté, bref le genre de produit calibré comme Hollywood en pond avec la régularité et l'absence de fantaisie d'une poule. Sauf qu'on est pas à Hollywood ici, mais en Nouvelle-Zélande, et ça, ça change quandmême deux ou trois paramètres. Laissez-moi vous affranchir: Randy et Dick n'existent pas; ils sont nés de l'imagination de deux comiques stars sévissant depuis une dizaine d'années à la télé néozélandaise, les susnommés Stapp & Heath, que certains ont comparé au duo Parker & Stone, comparaison qui s'applique uniquement dans leur commune prédilection pour l'humour potache et le politiquement incorrect. Parce qu'il y a une différence de taille et qui tient en deux mots: l'esprit kiwi. Ah, l'esprit kiwi! Une alchimie unique combinant l'individualisme et l'opiniatreté du pionnier américain à la décontraction et l'absence de scrupules des bagnards qui ont colonisé l'Australie, avec en prime un petit coté Redneck décomplexé pour la poésie du langage. A l'écran, ça donne un film complètement fou furieux, où des mécanos estropiés croisent des cascadeuses unijambistes, où on saute en scooter au dessus d'une rangée de tondeuses à gazons allumées et renversées, on passe le temps en tournée à se fracasser des bouteilles de vodka sur la tête, on ne peut pas ouvrir la bouche sans sortir l'intégralité de son catalogue d'injures, on se tape dans le dos pour mieux se poignarder la seconde d'après, j'en passe et des pires car le film en a encore beaucoup sous le pied. C'est assez indescriptible finalement, Stapp s'amusant à parodier en les mixant au gré de son humeur le film de groupe de rock en tournée à la "Spinal Tap", le film de prison, le thème Faustien en la personne du méphistophélique Sheldon Snake, le biopic évoqué plus haut, le gore bon enfant des "Seigneurs de la route", les cascades débiles à la "Jackass", le tout marinant dans cette confiture de bon goût que sont les défauts propres aux kiwis, une beauferie decomplexée dont Stapp se moque tout en la revendiquant bien haut comme un trésor national. Outrancier, grossier, trépidant, surprenant, souvent hilarant, gentiment gore, festival de tronches insensées, pur moment de rock'n roll, que dire de plus? "The devil dared me to" est tellement fait pour l'Absurde Séance que c'est avec le trémolo dans la voix des grandes émotions que nous l'accueillons dans note Panthéon personnel: "entre ici, Randy Cambell, avec ton burlesque cortège..." Goal of the dead 1ère & 2ème mi-temps réalisées par Benjamin Rocher et Thierry Poiraud, avec Alban Lenoir, Charlie Bruneau, Patrick Ligardes, Bruno Salomone, Xavier Laurent, Renaud Rutten, Jenny Arasse, ahmed Sylla. France / 2014 / 2h20 (avec un entracte). C'est la question sur laquelle les plus grands savants du monde stipendiés par Sepp Blatters se sont cassées les dents depuis la démonstration du théorème de Fermi: mais qu'est-ce qui pourrait rendre un match de foot intéressant? Déguiser les joueurs en homme-sandwichs? Bof...déjà fait. Equiper les supporters de vuvuzella pour pourrir les retransmissions? Naaan, c'est désormais interdit par la convention de Genève au même titre que les armes de destruction massive. Transfomer les spectateurs en zombis? Ben c'est déjà le cas, non? Oui, mais en vrais zombis, qui bouffent les gens pour de bon, joueurs et spectateurs compris, ça mettrait enfin du piment dans la compétition, non? Non? Bien sûr que oui! Imaginez:on a une équipe, mettons l'Olympique de Paris, qui part en province disputer un match de 32ème de finale avec celle d'un bourg du trou du cul du monde, disons Caplongue (c'est pour l'exemple). Dans l'équipe A on met un ancien joueur de Caplongue qui a trahi les siens pour monter à la capitale, ça c'est pour créer l'antagonisme, une étoile montante égocentrique et imbuvable (toute ressemblance etc), et un entraineur dépressif. Dans l'équipe B...on s'en fout c'est des bouseux et de toute façon ils vont se faire bouffer très vite. Entre les deux on ajoute une journaliste aux dents longues (mais non, ce n'est pas une vampire, on est pas chez Stephanie Meyers ici, dieu merci). Bref, les ingrédients classqiues d'une rencontre qui s'annonce aussi passionnante qu'une soirée en tête à tête avec Guy Roux dans un Campanille...Mais ajoutez-y des zombis, et là ça commence à funker! C'est à cette conclusion de bon sens que sont arrivés les deux réalisateurs de cet OFNI dans le paysage cinématographique français qu'est "Goal of the dead". Passionnés de cinéma Bis et désireux d'adapter en France le concept du double programme "Grind house" ressucité aux Ettas-unis par Quentin Tarantino et Robert Rodriguez, Benjamin Rocher (à qui l'on doit le bancal mais attachant film de zombis "La horde") et Thierry Poiraud ( coupable du WTF "Atomik Circus"), se sont partagés la tâche de raconter cette histoire en y apportant leur savoir faire et leur style: à Benjamin la partie comédie de caractères (la plus faiblarde il faut bien le dire) dans la première mi-temps, et à Thierry la partie action/gore (la plus réjouissante, mais le scénario joue en sa faveur), dans la deuxième. Le résultat? Un film tellement déconnant et en même temps si bien filmé (c'est bien simple, par certians moment on dirait un vrai film) qu'il en viendrait à conjurer la malédiction des films de genre français à jamais condamnés à la médiocrité. Alors,vous aimez le foot? Ce film est fait pour vous. Vous aimez la comédie? Ce film estr fait pour vous. Vous aimez la baston? Ce film est fait pout vous.. Vous aimez les zombis? Ce film est fait pour vous. Vous aimez les dilemnnes corléniens d'un couple en crise assis dans un deux pièces-cuisine? Ce film est fait pour...heu non, non, la baston, la baston, c'est ça. de Michele Soavi, avec Ruppert Everett, Anna Falchi, François Hadji-Lazaro scénario Gianni Romoli, d'après l'oeuvre éponyme de Tiziano Sclavi, le créateur de « Dylan Dog » Italie / 1994 / 1H40 Il se passe de drôles de choses dans le cimetière de Buffarola: la septième nuit suivant leur inhumation, les morts ont une fâcheuse tendance à sortir de leur tombe avec au ventre cette fringale propre aux dysenteriques astreints à toute une semaine de diète BRATT; et comme tout zombies qui se respectent, ils jetteront toujours leur dévolu non pas sur une bonne salade pleine de vitamine, mais sur le premier clampin venu afin de s'offrir un festin de tripoux et de pâte de tête...étonnez-vous après ça qu'ils aient si mauvaise mine. Mais, pour paraphraser un ministre humaniste, les morts-vivants illégaux ont vocation à retourner dans leur dernière demeure, et pour ça, heureusement, il y a l'homme de la situation: Francesco Dellamorte, l'impavide gardien du cimetière, qui fait entendre à coups de balles dum-dum la voix de la raison. Comme personne ne croit à une épidémie de « zombiite », en dépit des formulaires réglementaires qu'il remplit inlassablement pour demander du renfort aux édiles municipales, il en est réduit à ne compter que sur son fidèle assistant Gnaghi, un brave garçon à la corpulence inversement proportionnelle au brio de sa conversation; mais comme le dit la chanson:"l'amitié entre officiers, ça ne remplace pas les femmes", et Francesco, cloitré derrière les hauts murs du cimetière dans sa routine exterminatrice et sa solitude à deux, en fait jour après jour l'amère expérience. Un brin mélancolique (on le serait à moins), il s'accroche à la réalité par le dernier fil qui tienne encore, celui du téléphone, d'où lui parviennent les voix du monde extérieur, un monde dont il se sent irrémédiablement coupé, jusqu'au jour où la vie elle-même pénètre l'enceinte de la nécropole sous la forme d'une ...veuve! Pour Francesco la messe est dite: cette femme c'est Elle, celle de sa vie, et il va tout faire pour la conquérir. C'est sans compter avec les caprices du destin, qui nous inculque très tôt que "les histoires d'amour finissent mal en général", ce qu'on devrait pourtant savoir quand on est un tueur de zombies à la raison fluctuante. Un beau héros romantique et ténébreux, un sidekick improbable, une belle inconnue qui n'arrête pas de mourir et de revenir, des hordes de monstres tapis dans les replis d'un monde cauchemardesque s'insinuant insidieusement dans la réalité, pas de doutes, nous sommes bien dans l'univers baroque et distancié de Tiziano Sclavi, et de son héros le plus populaire: Dylan Dog. Fumetti extrêmement célèbre en Italie depuis sa création en 1986, cette bande dessinée met en scène un détective anglais spécialiste du surnaturel, qui passe son temps à poursuivre ghoules et sorcières tout en tombant amoureux de ses clientes, ce qui a des conséquences fatales pour lui comme pour elles. Cet univers gorgé de références à la culture pop, les films d'épouvantes et la littérature fantastique gothique repose sur un équilibre subtil entre cruauté violente des péripéties propres aux "Pulp magazines" et une certaine distance ironique du récit, un ton parfois poétique qui tranche avec le commun de la littérature de gare.Pourtant Dellamorte n'est pas Dylan, c'est un personnage à part entière auquel Sclavi avait consacré un roman avant même de créer sa star, et bien qu'il ne fut finalement publié qu'en 1991, on peut y voir l'ébauche de ce qui allait devenir son « opus magnus ». Difficile de croire qu'avec un tel potentiel il ait fallu attendre tant de temps pour voir le petit théâtre de Sclavi transposé au grand écran. Il aura fallu que deux conditions soient réunies: D'abord trouver un réalisateur capable de restituer sans l'affadir un monde original où se confondent sans cesse le vrai et le faux, l'humour et l'horreur, sans jamais tomber dans la balourdise ou le cynisme; ce fut chose faite en la personne de Michele Soavi, ancien assistant de Dario Argento et Terry Gilliam, un homme qui sait ce que puissance poétique et humour baroque peuvent accomplir sur le plus bancal des scénarii; d'aucuns (dont votre serviteur) s'accordent à dire que Dellamorte reste à ce jour sa plus grande réussite. Enfin il fallait trouver l'interprète capable d'incarner le héros de papier, et là force est de constater que le destin peut parfois accomplir des miracles, car c'est nul autre que Ruppert Everett qui accepta d'endosser le rôle, le même Everett dont l'élégance et l'ironie toutes britanniques avaient inspiré un auteur de BD transalpin pour les traits d'un nouveau héros baptisé... Dylan Dog! |
Absurde SéanceToutes les chroniques écrites dans le cadre du festival entre 2011 et 2015 Catégories
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