Oui, en dépit du Covid qui non content de faire tousser les catarrheux décime les événements culturels (pas de Court-Métrange cette année, sniff), l’Étrange Festival aura bien lieu comme toujours au Forum des Images, Joie, Délices et Orgues! Armée de quinze thermos de thé, les poches bourrées de masques fait-maison et de son calepin, Innana s'est ruée à la première journée de compétition, voici son compte-rendu. Aujourd'hui donc, 3 séances à l'étrange : un film d'horreur gothico-réaliste, la dernière comédie de Lloyd Kaufman et le trip halluciné d'un E.T. sous drogue dure. de Romola Garai Grande-Bretagne - 2020 Tomaz est un ex-soldat. Il est marqué par le combat, en cauchemarde toutes les nuits et son stress post-traumatique fait de lui un sdf. Il rencontre une nonne (Imelda Staunton) qui lui propose un marché : il emménage dans une grande battisse délabrée pour aider Magda (Carla Juri), qui s'occupe de sa maman gravement malade, en remettant la maison en état. D'un film sociétal sur le devenir des militaires traumatisés à la guerre, le film glisse lentement vers une horreur gothique dans cette maison sombre, accompagné des cris réguliers de la mère qui souffre le martyr dans sa chambre à l'étage. L'ambiance devient pesante et Tomaz comme le spectateur sont en proie à une angoisse étouffante. La thématique profonde du film ne peut être révélée sans spoiler (ce que nous ne faisons pas ici), mais sachez que c'est bien traité et s'appuie sur une expérience vécue par Romola Garai. L'approche fantastique du sujet apporte un vrai plus à cette histoire tristement banale. La construction du film a cependant quelques défauts, le spectateur se perd un peu dans les différents flash-back (notamment car ceux-ci ne sont pas toujours linéaires), mais l’ensemble reste très cohérent. Un bon point pour l'éclairage et la photographie. Les plans sont posés et soignés; ce film évite un écueil rédhibitoire (à mon goût), le jump scare, devenu tellement facile et passe-partout que c'en est lassant. Pas de ça ici, merci bien. Et même si la fin est un brin attendu, cela reste un très bon premier film. Sortie US le 24 juillet 2020, sortie française inconnue... de Lloyd Kaufman USA - 2020 Big Al dirige une compagnie pharmaceutique sans éthique : si ça se vend, peu importe les conséquences sur la santé de ses contemporains. Pour fêter le lancement de son dernier produit, un remède contre la lassitude des pauvres petites enfants riches, il organise une croisière lubrique (des prostituées en pagaille) et open bar sur la drogue. Apprenant ça, Prospero, dont la carrière fut ruinée par Big Al quelques années auparavant, fomente une vengeance à la hauteur de sa rancune : par le biais d'un laxatif, il noie le yacht sous une pluie de merde d'orques afin de le faire échouer à Tromaville, New Jersey... Bien-pensants, âmes sensibles et amis du bon goût, abandonner ici tout espoir : voici le dernier opus Troma, le Lloyd Kaufman définitif (son dernier long selon lui), connu pour être le pape de la comédie indépendante triviale, indélicate et vulgaire, mais toujours militante. A 75 ans, il prend toujours autant de plaisir à épingler tous les défauts de notre société, que ce soit les "social warrior", les laboratoires pharmaceutiques sans morale, les talk show, les médias, et évidemment les moutons que nous sommes tous plus ou moins. Pour cela, il n'y va pas avec le dos de la cuillère. Il prend son pied à incarner deux rôles, Prospero, dont la vengeance est implacable, et sa soeur, à la solde de Big Al (il ressemble d'ailleurs à un Iggy Pop travesti en pleine walk of shame, hilarant !). Il exploite tous ses gimmicks, des blagues de prouts et de caca, des poulets mutants à la bite énorme, à une avalanche de nichons, tout en y insérant des citations de Shakespeare, allant même jusqu'à faire parler l'auteur qui explique qu'il n'y a jamais eu meilleure adaptation de sa pièce La tempête. Bref, c'est drôle, méchant, débile, mais toujours avec un petit fond activiste pas désagréable. Du grand, très grand Kaufman !!! Pour vous donner une idée du ton, matez la bande annonce en début d'article et ce magnifique trailer, qui pose bien les bases du film... (ce monsieur ne respecte vraiment rien, sauf son idéologie punk-anarchiste !) de Ryan Kruger Afrique du Sud - 2020 Barry vit au Cap, il est héroïnomane. Il ne s'occupe ni de sa femme ni de son fils, entre shoots et bars, il n'a pas le temps... Après une injection, il se fait enlever par une soucoupe volante, le voilà complètement nouveau, puisque habité par une entité extra-terrestre, un étranger découvrant la terre par une errance de drogue et de sexe. Premier film pour Ryan Kruger, après diverses apparitions dans des films ou séries télé, et un paquet de courts métrages derrière la caméra. Il nous décrit son premier long comme le trip d'un "E.T. sous crack" et il n'a pas complètement tort. Son personnage déambule dans les rues, sans but précis, testant différentes drogues, couchant avec n'importe quelle prostituée. Il apprend du comportement humain à chaque expérience, chaque observation, s'adaptant pour se faire passer pour l'un d'entre nous. Tourné en 28 jours, répartis sur un an et demi, le temps de trouver à chaque shooting le budget nécessaire pour continuer, Fried Barry emploie des acteurs inconnus, comme Gary Green, dont c'est la premier apparition sur écran. Il doit avoir dix lignes de dialogue dans tout le film, et fait passer tout le reste grâce à ses yeux, son visage et son corps, avec un talent indéniable. Il incarne parfaitement ce Barry "grillé", extraterrestre plongé dans un monde qu'il ne connait ni ne comprend. Au niveau de la réalisation, on assiste à un démarrage assez lent, qui nous pose le personnage, avant de passer par une étape frénétique (le moment où il découvre les différents plaisirs nocturnes), avec une réalisation beaucoup plus énergique, saccadée, et des éclairages psychédéliques. Le troisième acte est beaucoup plus posé, montrant la parfaite adaptation de cet alien à notre monde déjanté. Bref, Fried Barry, s'il est bien l'acid trip promis, est incarné avec beaucoup d'humanité et d'habileté, ainsi qu'une bonne dose de sentiment par cet inconnu qui, ici, crève l'écran.
On espère vraiment une sortie française pour cet ovni, si jamais ça arrive (ce sera probablement sur plate-forme, les salles ne se risquant guère par les temps qui courent à proposer des œuvres aussi atypiques), on vous tient au courant!
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