par Inanna Ivert
Un film chinois avec de la psychanalyse de comptoir, un Snatch russe très maîtrisé, une comédie sanglante jouissive avec Mr Vincent Price et un documentaire sur un génie du stop-motion.
de Zhang Chong
Chine - 2019
Sang Yu fait des cauchemars à chaque fois qu'il s'endort : un personnage vaporeux au visage bleu essaie systématiquement de lui faire la peau. Une nuit, alors qu'il tente de résister au sommeil, il sombre, mais cette fois, il se bat contre le monstre, lui prend son arme et se réveille... l'arme à la main. Il utilise donc cette capacité pour ramener des trésors et se faire des couilles en or. Pour le moment, pas de problème, tout ce qui lui arrive dans le rêve (blessures...) n'a aucune conséquence sur la réalité.
Comment vous parler de ce film sans être très, très, très désagréable...?
Sur le papier, ça le fait, mais le traitement par le scénariste et le réalisateur qui ajoutent à cette histoire fantastique de la psychologie de comptoir sur la place du ça, du moi et du sur-moi... c'est une catastrophe (le film devait d'ailleurs se titrer Sur-ego et non Super-me, mais les producteurs ont dû brainstormer que ça serait moins compréhensible au commun des mortels, argh !)
Quoiqu'il en soit, l'utilisation à des fins fictionnelles des concepts inventés par Freud, non content d'être réduits à leur plus simple expression ( nonobstant le fait qu'ils soient dans l'ensemble abandonnés par la neuro-psychiatrie moderne et même un certain nombre d'écoles psychanalytiques, mais c'est un autre débat) , forme un gloubi boulga particulièrement indigeste. [ NDLR: Quitte à voir un film psychanalytique, autant revoir "La maison du docteur Edwardes"!]
Si on y rajoute une petite morale comme quoi l'argent ne fait pas le bonheur, ça donne une idée du niveau de bouse de ce film...
Je vous mets malgré tout le Q&A...
de Kirill Sokolov
Russie - 2018
Matvey aime Olya, et il ferait tout pour elle. Y compris la venger de son père qui a abusé d'elle quand elle avait 12 ans.
Il se pointe donc chez le père en question, armé de sa bite et de son marteau (on est en Russie....) pour lui régler son compte, avant de s'apercevoir que le monsieur est un flic bourru, pas du tout décidé à se laisser faire.
Mon coup de cœur personnel du PIFFF 2019 (et celui des spectateurs : il a gagné l'Oeil d'or, ainsi que le prix des lecteurs de Mad Movies).
Ce film est un petit bijou, d'une violence rare et décomplexée (on pense à Tarantino à ses débuts ou à Snatch de Guy Ritchie)
Mais ce n'est pas que ce jeu de massacre jouissif qui a attiré mon attention, c'est la maîtrise incroyable du réalisateur, dont c'est le premier film, sur une foultitude de détails : de la colorimétrie, aux plans bourrés de références (western, polar...) en passant par la musique. C'est juste un petit bijou
De l'aveu même du réalisateur (qui a commencé par être diplômé en physique des nanoparticules tout en étant un grand fan de cinéma), le film pioche beaucoup d'inspiration dans le cinéma coréen et ses changements de rythme et de style (de la comédie au drame avec un énorme travail esthétique), ainsi que dans le western spaghetti dont il est un grand fan (cf la scène du duel, parallèle évident avec Le bon, la brute et le truand).
Le petit bonus du film, c'est qu'il ne se contente pas de cette plastique impeccable, de copier ses modèles. Il y a un vrai travail créatif et une critique acerbe de la civilisation, particulièrement russe (mais qui parlera, je pense, à tous les spectateurs).
L'huis clos dans cette famille dysfonctionnelle représente sans conteste les tensions présentent dans société russe actuelle (ça n'est pas un hasard si le père, représentant le pouvoir en place, balance un poste de télé sur le jeune homme). La Russie a d'ailleurs (étrangement) financé une partie de la production et a même déjà signé pour le second long de Kirill Sokolov (qu'on espère aussi inspiré !!).
Bref, c'est violent, gore et intelligent, travaillé niveau ambiance sonore et critique sociétale, je n'ai rien d'autre à dire que foncez !!
NB : Le film a été acheté par Wild Side pour la distribution française (mais on ne connait pas encore ni la date ni le type de sortie prévue). Nos amis germanophones pourront se régaler de l’édition DVD à partir du 20 mars 2020.
NB bis : en bonus, une petite chanson assez géniale de la BO
Et pour en savoir un peu plus, le Q&A du PIFFF
de Douglas Hickox
Grande-Bretagne - 1973
Edward Lionheart (Vincent Price, toujours aussi génial), acteur obsédé par Shakespeare, n'a reçu que des critiques négatives au long de sa carrière. Il décide donc de se venger, zigouillant ses détracteurs, s'inspirant de son auteur fétiche pour les punir de leur "mauvais" gout.
Vincent Price cabotine à mort (et c'est le cas de le dire) dans cette comédie morbide (de son propre aveu "le film qu'il a préféré tourner, mais aussi un des plus difficiles, tant il est complexe de jouer un mauvais acteur).
Le voir se grimer différemment pour chaque crime est absolument jouissif !
Et en incroyable second rôle, nous trouvons Diana Rigg, qui joue la fille de Lionheart, (mal) deguisée en homme la moitié du film. A hurler de rire !!
Vengeance du réalisateur par rapport à sa carrière peu glorieuse ou juste bonne comédie gore, à vous de voir. Ne ratez pas cette kitscherie délicieuse, ça serait passer à côté d'un grand moment !
Phil Tippett est considéré comme un génie des effets spéciaux, le successeur de Ray Harryhausen. Il a commencé très jeune, sculptant de l'argile dans sa chambre, puis a fait une école d'arts conceptuels à San Diego où il peut exprimer toute sa créativité.
Le premier grand film sur lequel il travaille est Star Wars, un nouvel espoir (chapitre IV, pour ceux qui ont du mal à suivre), en 1977, essentiellement sur la scène de la cantina, en équipe avec Rick Backer. Il enchaîne ensuite sur Piranhas de Joe Dante, L'empire contre-attaque, Indiana Jones et le temple maudit de Steven Spielberg, RoboCop de Paul Verhoeven, Willow de Ron Howard... Bref, le gars n'est pas vraiment manchot...
Jusqu'au tout début des années 90, Tippett était considéré comme un des meilleurs animateurs de son temps, comprenant la façon de se mouvoir des créatures comme personne. Il travaille en stop-motion (image par image, les miniatures déplacées manuellement).
Trouvant que cette technique laisse un vide où il devrait y avoir un flou (comme dans un mouvement réel), il développe le go-motion pour animer de manière plus réaliste les tauntauns de L'empire contre-attaque (c'est une variante où les mannequins bougent grâce à un système robotique, permettant un mouvement beaucoup plus fluide).
Puis arrive Jurassic Park... Spielberg lui demande de créer des dinosaures taille réelle, ce que Tippett refuse, convaincu que le rendu sera décevant. Il travaille quand même sur des maquettes, les anime et montre le résultat à Spielberg. En parrallèle, Industrial Light & Magic (ILM) bûche sur des dino en images de synthèse... ce qui a finalement eu la préférence de Spielberg. Tippett se sent alors "comme Méliès", "une espèce éteinte" (phrase reprise dans le film, pour le clin d’œil)
On assiste donc à la fin de la carrière d'animateur de stop/go-motion de Tippett mais au début de son travail de superviseur des effets spéciaux des créatures (son talent pour donner vie à des animaux surréalistes est toujours valable avec une animation en image de synthèse)...
C'est un peu triste de voir le passage d'un artiste créateur manuel à un directeur d’équipe technique (Tippett le reconnait lui même) et il se lance donc dans un projet qui lui tient à cœur depuis longtemps : Mad God (dispo en SVOD sur Vimeo)
Avec ce documentaire, les deux réalisateurs terminent leur "Trilogie des monstres" (avec Ray Harryhausen : Le Titan des Effets Spéciaux, puis Le complexe de Frankenstein, qui sans se focaliser sur un artiste en particulier, traitait des concepteurs de créatures fantastiques pour le cinéma).
Ils nous livrent un portrait d'un génie né un peu trop tard pour avoir fait la totalité de sa carrière dans ce qui le passionne vraiment, un peu mélancolique et dépressif. Il dit lui même que ce qui se passera à sa mort, tomber dans l'oubli ou entrer dans les livres d'histoire, lui importe peu...
interview au FEFFS (Strasbourg)
Et le classique Q&A du PIFFF
NB : Carlotta lance une campagne de crowdfunding le 10 janvier sur Kiss Kiss Bank Bank. On n'est pas certain de voir le DVD un jour...
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