Déjà, quel joli titre pour exprimer ce qui fait tout le sel de ce film : une vengeance anté-natale. Le pitch : Ruth est enceinte, et seule... enfin, presque seule. Son fœtus lui parle, et la pousse, plus ou moins malgré elle, à faire le ménage autour d'elle d'une manière assez radicale. "tu vas voir, un enfant ça change la vie..." Alice Lowe (vue dans Touristes, Hot Fuzz ou Kill list), actrice et réalisatrice de ce long, terminait un tournage avec Jamie Adams (Black Mountain Poets), lorsque le réalisateur, conquis par sa présence à l'écran lui demande de rempiler. Alice lui répond que malheureusement, enceinte, elle va mettre sa carrière entre parenthèses... puis, réfléchissant, lui annonce qu'elle a un scénario pour lequel elle serait ravie de prêter son corps... Devant le tabou du synopsis, celui-ci s'efface, ne laissant d'autre choix à Alice que de se mettre elle-même en scène. Cette première réalisation, tournée en 11 jours alors qu'elle en est à 7 mois et demi de grossesse montre la gestation du point de vue de la femme. Un corps étranger pousse en elle, et elle ne se sent plus vraiment libre de ses actions. Avant même la naissance, c'est le bébé qui contrôle sa vie, lui impose les choix à faire, les actes à effectuer, qu'elle soit ou non d'accord. Elle ne dégouline pas d'amour pour cet être, ne se transforme pas en nidificatrice, elle essaie juste de combler les attentes de cet alien qui lui parle et l'encourage à agir, à réagir. Elle doit se battre contre le planning familial qui la soupçonne de ne pas prendre soin d'elle, et passant pour une femme fragile (car enceinte) réussi à s'approcher de ses victimes que le fœtus lui désigne, consignant chacune de ces rencontres fatales bien soigneusement dans un album des "premiers pas de bébé". On est loin de la vision idyllique et épanouissante de la maternité. Ici, pas question de cette plénitude ressentie par la génitrice, elle doute et redoute la venue au monde de cet autre qui déjà de sa poche de liquide amniotique perturbe son monde. De son aveu, la réalisatrice a pourtant très bien vécu sa grossesse et ne souffrait pas du symptôme du "baby blues", mais elle souhaitait vraiment montrer la pression que la société met sur la femme enceinte. Avec un ton souvent drôle, toujours pertinent, Alice Lowe dépeint ici tous les questionnements d'une mère, ses doutes et ses peurs, de savoir si elle sera à la hauteur de ce bébé si exigeant. En pleine crise existentielle, elle se débat pour ne pas sombrer lorsqu'elle finit par se questionner : est-ce bien le bébé qui la manipule ...? PREVENGE
écrit et réalisé par Alice Lowe, avec Alice Lowe, Gemma Whelan, Joe Hartley, Kate Dickie GB/2016/88 mn Pas de sortie en France pour l'instant
1 Commentaire
Cabine fever
14/12/2016 02:29:09
Pour ma part, l'intrigue me rappelle furieusement "Baby Blood" d'Alain Robak, un film français de 1989 narrant les mésaventures de Yanka, un femme possédée par son fœtus qui la poussait à tuer des inconnus pour assouvir sa soif de sang. Bon, là on était dans le pur film d'exploitation bien gore (je me souviens encore de la mise à mort d'Alain Chabat comme un grand moment de grotesque rigolo), je me doute d'après ta chronique que Prevenge est plus ambitieux et s'oriente davantage vers le thriller psychologique à la Polansky, n’empêche.
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