Par Innana Ivert
Et comme je ne recule devant aucun sacrifice, aujourd'hui, 4 séances de courts : "Inclassable(s)", "(F)Auteurs de troubles", "Zones de turbulences", et une séance spéciale concoctée par nos amis belges "Bruxelles Zwante" (qui ont définitivement très bon goût).
Alors là, les gars, bravo, on ne se mouille pas sur l'intitulé de la séance. En gros c'est fourre-tout (mais pas forcément mauvais), la preuve avec ces quelques courts qui m'ont vraiment plu.
Mémorable
Louis, artiste peintre, perd la mémoire. Son univers se délite peu à peu dans son Alzheimer au point que les objets fondent et que le monde qui l'entoure se résume à des touches colorées. Émouvant et poétique, ce court en stop-motion, permettant au réalisateur de modeler l'univers de Louis de plus en plus abstrait au fur et à mesure que la maladie progresse, est particulièrement réussi. A découvrir absolument. De Bruno Collet. France
Re : Possessed Homes
Court au ton comique traitant d'un agent immobilier, mère célibataire, spécialisée dans les ventes de maisons hantées. Elle nettoie le sang des crimes, cache les fantômes, recouvre les pentacles par des tapis et maquille les claquements de porte et ouvertures intempestives de placard pour que des gentils acquéreurs signent avec elle... Drôle et bien réalisé. De Matthew Evans Landry. Canada
Un peu moins convaincue mais le zeste d'originalité qu'ils contiennent me donne quand même envie d'en toucher un mot :
Snaggletooth
“Snaggletooth” (trailer) from Joe Sikoryak on Vimeo. De nuit, une mère emmène sa fille dans un manoir gothique un peu flippant (mention particulière à Murnau, incarné par Susan Louise O'Connor, carrément effrayante en assistante). Elles vont voir un dentiste car la petite fille a un problème de Snaggletooth (dent qui pousse de travers), la mère lui explique que c'est indispensable d'y remédier, avant d'aller chercher le chien qu'elle lui a promis pour la traîner là. Le twist ne se devine pas tout de suite, et c'est pour ça que j'ai apprécié ce court, plutôt humoristique. La musique d'entrée dans le manoir me fait penser au thème de Shining [ NDLR: le thème du Dies Irae réorchestré par Wendy Carlos qui ouvre le film de Kubrick] (donc bonne ambiance !) De Colin Bishopp. USA
El Cuento
Une mère célibataire ne supporte plus ses deux fils qui passent leur temps à épier la vieille voisine en face, prétendant que c'est une sorcière. Ils réclament une histoire pour s'endormir, ils ne vont pas être déçus.
J'ai adoré la scène où la maman raconte l'histoire très flippante de la sorcière, en plan-séquence sur l’aîné des garçons qui se décompose de terreur au fur et à mesure. La chute est malheureusement prévisible mais ça reste tout à fait regardable avec plaisir. De Lucas Paulino et Angel Torres. Espagne
Les enfants et les ado, ça ne cause que des soucis (faites comme moi, n'en ayez jamais, ça sauvera peut-être la planète... ou c'est juste mon égoïsme qui parle). Bref, cette séance est consacrée aux dérapages d'une progéniture devenue incontrôlable...
Sans parler de coup de cœur, disons que j'ai bien apprécié ces trois courts (et comme je suis sadique, je vais vous mettre en lien deux autres...)
Here there be monster
Victime de harcèlement dans le bus scolaire, Elki s'endort pour ne se réveiller qu'au dépôt de bus, seule...ou presque.
La bête est très réussie sur les gros plans (sabots, naseaux, main gluante) mais beaucoup moins en plan global. Et le final est une bonne surprise, donc je dis oui !
De Drew MacDonald. Australie
Bailaora
(The Flamenco dancer)
Dans un village où tous semblent morts, un groupe de militaires découvre un des enfants cachés dans l'église.
Le film commence avec des images en 1:1 de ce qui semble être un vrai conflit militaire, avant de passer en format cinémascope pour la fiction, le tout en noir et blanc, sans un mot prononcé. Très onirique et poétique, ce court tente de nous dire que parfois, l'art seul peut-être une forme de résistance. de Rubin Stein. Espagne
The Dreamer
The Dreamer - Trailer from Kenneth Karlstad on Vimeo. Alex, petite fille, est somnambule et souffre de terreurs nocturnes que sa mère tente de calmer en lui répétant que ça n'est qu'un cauchemar et qu'en pensant à des choses joyeuses, elle devrait faire des rêves plus agréables. Pas mal, car la fin est réussie, mais la réalisation est assez classique pour ce court d'horreur qui reste efficace (et la gamine ne joue pas comme un pied!). De Kenneth Karlstad. Norvège
Et donc, comme promis, deux liens pour visionner autre chose :
Ce goût en bouche
un court que je n'ai pas compris. (film de fin d'étude de l'ASA Atelier Supérieur d'Animation de Sèvres) CE GOÛT EN BOUCHE from ASA on Vimeo. de Laura Passalacqua. France
Fest
que j'ai détesté (commetout ce que fait ce réalisateur, désolée pour lui). Graphisme Minecraft, musique et cadrage épileptique, moche et avec des mouvements de « camera » assez vomitifs. Faites vous plaisir ! (mais vous serez peut-être d'un avis différent du mien) Fest from nikita diakur on Vimeo. de Nikita Diakur. Allemagne
Un petit nota bene sur L'heure de l'ours, que j'ai trouvé graphiquement très beau mais dont le propos me dérange : depuis quand les enfants décident à la place des adultes (ou alors c'est juste un conte sur un petit garçon possessif...)
Après les enfants, voici donc les adultes qui partent en vrille ou plutôt qui « sont en conflit avec une société ou un système dans lesquels ils peinent à trouver leur place » dixit le fascicule... A voir si nous sommes tous des sociopathes (non adaptés à la société) ou si c'est la société qui n'est pas adaptée à nous...
C'est donc sûr, je préfère les adultes aux enfants (et encore faut-ils qu'ils soient assez dérangés, de toute évidence).
Nyet !
Boris et Olga arrivent à Douvres avec un chargement que le chien trouve suspect. Fouille au corps et j'en passe...
Je vous laisse vous faire un avis avant de lire ce qui suit. Super film anti-Brexit [ NDLR: Ha d'accord, donc là on prend carrément parti! Merci Innana, on va avoir les fans d'Asselineau sur le dos...] (qui explique au générique que si aucun animal n'a été blessé pendant le tournage, beaucoup d'anglais sont mis en péril par cette décision politique). Décrit par les réalisateurs comme A Brexit UK Border Farce. Militant et très drôle en prime ! De Alex Helfrecht et Jörg Tittel. Royaume-Uni
PTSD
(ou SSPT Syndrome de Stress Post-Traumatique) PTSD trailer from CaLM! on Vimeo. 3 courts d'animation de styles très différents regroupés sous ce titre évocateur. Billy, gamin perturbé qui se shoote aux tranquillisants de sa mère ; un groupe de canes qui discutent dans leur mare avant d'être importunées par une bouée canard ; une chaîne de violence, d'un garçon à un chien, à un voisin, chacun reportant sa haine et sa frustration sur l'autre. Les trois sont très réussis, que ce soit point de vue animation ou scénario. Un bon point à toutes ! De Claudia Cortés-Espejo, Lora D'Addazio et Mathilde Remy. Belgique
Boy's Club
Ou l'histoire de deux potes enfermés dans un bunker après une apocalypse Zombie (ou quelque chose d'approchant). La présence d'une femme manque tellement à l'un deux qu'il se masturbe en regardant une image féminine sur une boite de conserve ; cinq fois ; avant midi. La solution semble toute trouvée quand il aperçoit une poupée gonflable dans une camionnette à l’extérieur... Beaucoup d'humour pour ce court au scénario original et très bien réalisé (une scène hors champs, où une créature dévore quelqu'un, ne passe que par les grognements, les bruitages de machouillages et le regard apeuré du protagoniste qui se cache). Très bon ! De Troy Dewinne. USA
Maintenant deux courts pour lesquels je suis un peu plus en mi-teinte :
Fuse
Une souris est attrapée (elle détruit les stocks du propriétaire du magasin depuis 3 mois), le village entier se met alors à épiloguer (en chanson) pour savoir quoi faire de la bestiole. Graphiquement intéressant (j'ai pensé à certains Bill Plympton, mais pas exactement, moins brutal sur le trait), le scénario est pas désagréable, avec un grain de folie assez rafraîchissant mais m'a laissée un peu … mouaif. [NDLR: mais tu oublie de mentionner qu'il y a Nick cave au générique!]. De Shadi Adib. Allemagne
Woe is me
WOE IS ME TRAILER from Elation Pictures on Vimeo. Teddy se rend dans un groupe de parole pour essayer de trouver de l'aide, mais ce qu'il demande va un peu au delà des mots... Le scénario est original et tient la route, mais la morale m'a gênée : "si tu n'aimes pas ce que tu es, bouges toi les fesses pour changer au lieu de subir ta condition" (bien) mais on ne parle jamais d'acceptation de soi tel que nous sommes (dommage car il y a bien des choses qu'il est impossible de changer...) de Simon Cartwright. Royaume-Uni
.Hors compétition, ces courts ont été sélectionnés par la crème de la belgitude, soit le BIFFF, Court mais trash et le Brussel short film festival. A déguster accompagné d'une (ou deux) petite trappiste...
NB : Zwanze signifie "art de vivre bruxellois", le titre est emprunté à un site qui vous permettra, si vous êtres curieux, d'en savoir plus sur nos amis wallons.
Alors là, rien à jeter dans cette session. Le public devait même voter pour son court préféré mais le choix fut bien difficile...
Baghead
Petite merveille découverte au PIFFF de l'année dernière (et sélectionnée par le BIFFF).
Kevin vient de perdre sa fiancée. Il se rend à l'arrière d'un bar délabré, pour rencontrer un oracle réputé permettre aux défunts de répondre aux questions des vivants et espère ainsi faire son deuil... Une merveille de scénario tordu. J'avais adoré le premier visionnage en décembre, j'aime toujours autant... de Alberto Corredor Marina. Royaume-Uni. 2017
The Voorman Problem
Le directeur de la prison appelle un psychiatre, le Dr Williams (excellent Martin Freeman) pour examiner un détenu qui se prend pour Dieu... mais est-il vraiment malade ? NB : Pour les incultes comme moi, solipsisme signifie « théorie d'après laquelle il n'y aurait pour le sujet pensant d'autre réalité que lui-même » Scénario très bien écrit, mise en scène efficace bien que basique avec champs/ contre-champs entre ce psy et Voorman, qui a un peu la diction très posée d'Hannibal Lecter (et qui, du coup, fait quand même bien flipper). disponible à 3€49 en VOD de Mark Gill. Royaume-Uni. 2013
Dispersion
Un homme prépare les funérailles de sa mère grâce à une borne automatisée Easy Coffin. Le réalisateur, présent, est venu dire un mot, expliquant qu'il ne regardait pas de films de genre et qu'il n'avait même pas conscience d'en avoir réalisé un. Il a adoré l'esprit bon enfant du festival (et mériterait, je pense, une petite explication de texte sur ce qui peut être défini comme un film « de genre »). Énormément d'humour, mise en scène simple et efficace (parfois, il vaut mieux ne pas trop en faire, cela permet de ménager l'effet comique), bref c'est réussi ! De Basile Vuillemin. Suisse, Belgique. 2018
Next Floor
Je vous en parle pour vous conseiller de le regarder, il est disponible... Pour info, c'est un court de Denis Villeneuve (Sicario, Premier contact, Blade Runner 2049), et ensuite lire ce que j'en pense. Il a été séléctionné en 2008 à la Quinzaine des réalisateurs à Cannes et a gagné le grand prix Canal + du meilleur court. Next Floor from Centre Phi | Phi Centre on Vimeo. Une petite touche La grande bouffe pour cette tablée qui s'empiffre au point de faire s'effondrer le plancher (mais sans le côté suicide programmé et désespoir). Le tableau de ces aristocrates pomponnés et ces serveurs en livrée, accompagnés d'un quatuor de cordes, qui suivent sans moufter la descente aux Enfers d'une bande de privilégiés étage après étage, c'est vraiment très drôle (et ça met un peu mal à l'aise, cet étalage de nourriture et leur goinfrerie sans limite). [NDLR: une métaphore du suicide de la civilisation occidentale et sa soif absurde de sur-consommation peut-être?]. De Denis Villeneuve. France, Québec. 2008
How it feels to be hungover
(Hur det känns att vara bakis) Un homme se réveille à l’hôpital d'Uppsala (Suède), sous perfusion. Diagnostique : Gueule de bois maligne. Le décalage entre ce milieu hospitalier très réaliste (infirmières, médecin, perfusions, ballons de soutient « Get better soon ») et le ridicule de la situation (« A votre âge, il ne faut pas boire après minuit ») est juste hilarant ! Qui ne s'est pas déjà senti dans cet état pitoyable, promettant que plus jamais ça n'arriverait... ? De Viktor Hertz. Suède. 2018
Spoiler
Une jeune femme trouve en pleine nuit un carnet de croquis posé devant la porte. Elle commence à baliser quand elle réalise que ces dessins la représentent aux moments présent... et futur.
Le pitch est intéressant, le film ne se perd pas en circonvolutions inutiles, mais bizarrement, il ne m'a que moyennement enthousiasmée. Il faut dire que vu le niveau de la sélection, on devient vite difficile ! [NDLR: la faute peut-être à un pitch déjà employé ailleurs dans nombre de films d'horreur, utilisant les mêmes ressorts dramatiques, qu'ils soient courts ou longs, forcément au bout d'un moment la surprise s'émousse.] de Evgeny Kolyadintsev. Russie. 2017
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